C'est une tendance qui se poursuit depuis plusieurs années maintenant: la disparition des guichets avec présence humaine dans les gares, notamment les plus petites.
Ainsi, en janvier prochain, les guichets de 13 gares dans le Grand Est seront fermés. Jusqu'à présent, les horaires de présence des agents avaient déjà été réduits.
Seize autres dont celles de Mulhouse et Reims réduiront leurs horaires ou le nombre de guichets ouverts. La décision était déjà prise dans le cadre d'un contrat liant la Région et la SNCF jusqu'en 2033.
Rappelons que ce sont les Régions qui organisent et financent les transports régionaux (TER) en tant qu'autorité organisatrice, la SNCF (ou autre) étant l'opérateur exploitant.
Il était déjà prévu de "baisser le nombre d'heures de guichet", explique à l'AFP Thibaud Philipps, vice-président de région chargé des transports. En décembre dernier, la Région Grand Est avait voté une réduction de 17 millions d’euros de son budget consacré au transport.
Pour se justifier, la Région explique avoir observé "une baisse d'année en année du nombre de tickets vendus" en gare: 31% de ventes de billets TER au guichet en 2019 contre seulement 11% en 2024.
Dans ces 13 guichets, une moyenne "de 6 à 10 ventes par jour" est réalisée, soit "un très faible flux au quotidien".
"Le revenu annuel qu’ils génèrent se monte à 8.000 euros alors que nous versons 200.000 euros par guichet en service et par an à la SNCF", indique le responsable aux DNA.Seuls 28% des titres TER dans le Grand Est sont achetés en gare (11% au guichet, 17% sur les bornes), et le reste en ligne ou sur l'application SNCF Connect.
"Il s’agit de s’adapter au changement de pratique des usagers qui achètent de plus en plus leurs billets en ligne, et ainsi faire des économies", ajoute Thibaud Philipps.Les régions et la SNCF rappellent que d'autres solutions que le guichet existent pour acheter un billet avant de monter dans un train notamment "les canaux de vente digitaux, les automates en gare, les ventes chez des partenaires (buralistes, commerces…), les guichets mobiles, la vente par téléphone".
Dans le Grand Est en particulier, une expérimentation sera menée avec La Poste, qui pourra vendre les titres TER dans ses bureaux, y compris le samedi.
La compagnie ferroviaire souligne que 96% des voyageurs de TER bénéficient d’une solution de distribution (guichet ou distributeur) dans la gare qu’ils empruntent, et qu'elle ne décide pas seule de la présence ou non de guichets, "c’est le fruit d’un travail main dans la main avec chaque région".
Pour autant, ces disparitions programmées émeuvent, notamment auprès des clients âgés. "On est dépassés avec le numérique", regrette Jean, 83 ans, cité par l'AFP. Béa, 68 ans, qui l'accompagne, l'assure: "ça va nous pénaliser, ça nous pénalise déjà. En ligne, on n'arrive jamais à aller au bout du processus" d'achat des tickets.
D'autres se contentent des bornes, encore faut-il qu'elles fonctionnent. "L'appareil est cassé la plupart du temps, contrairement à l'humain" à qui "on peut demander plein de choses auxquelles la machine ne répond pas", confirme Mireille Douvier, 55 ans, qui prend régulièrement le train pour Metz. La fermeture des guichets, "ce n'est pas une bonne idée du tout".
Du côté des syndicats de cheminots, on enrage. Dans un communiqué, Sud Rail dénonce une "attaque directe contre l'égalité d'accès au service public, la sécurité des voyageurs, et la présence humaine indispensable dans les gares". Le "modèle tout-digital ne fait qu'accroître les inégalités et déresponsabilise la SNCF de ses missions de service public.", peut-on lire.
"Sous prétexte d’économies ou de digitalisation, ce sont en réalité des suppressions de postes et une dégradation du service rendu aux voyageurs", poursuit l'organisation syndicale qui pointe "moins d’accompagnement pour les personnes âgées, en situation de handicap ou ne maîtrisant pas les outils numériques. Moins de conseils personnalisés sur les trajets, abonnements ou tarifs sociaux. Davantage de saturation des bornes automatiques ou de difficultés d’achat en ligne".
"On va transformer les halls de gare en désert. Les voyageurs seront livrés à eux-mêmes, déjà qu’il n’y a plus personne sur les quais", estime de son côté Delphine Huens, une responsable CGT de la région.Alors que la mise en oeuvre de la décision approche, une pétition lancée par la CGT cheminots du Grand Est a recueilli plus de 750 signatures.
2025-05-16T16:01:53Z